Bourg-Blanc (29). MéGO ! met le paquet sur le recyclage des filtres de cigarettes

L'idée est aussi banale qu'elle est géniale ! Depuis trois ans, l'entreprise MéGO récupère, trie et recycle les mégots de cigarettes pour en faire du mobilier urbain. Démarrée à petite échelle, l'activité prend de l’ampleur et gagne en notoriété. Plusieurs collectivités et de nombreux collecteurs en France s’y intéressent. Pour autant, Bastien Lucas, fondateur et gérant de MéGO, ne s'enflamme pas. Si le développement de l'entreprise va crescendo, il se fera dans le respect des valeurs de cette jeune pousse brestoise : donner du sens au tri, responsabiliser les citoyens et participer à la préservation de l'environnement. Pour lui, l'aventure ne fait que commencer !

Les prototypes dessinés par le designer costarmoricain Vincent Beaucourt trônent au milieu de l’entrepôt. Plusieurs exemplaires partiront bientôt aux Sables d’Olonne pour équiper la ville départ du Vendée Globe de ces éléments urbains : des bancs en métal forgé et coiffés d’une assise en aggloméré d’acétate de cellulose, matière plastique extraite des mégots de cigarettes recyclés à deux pas de là.

La première et l’unique unité de traitement des mégots en France

On passe la rue et nous voici plongés au coeur du réacteur de MéGO, dans l’atelier où sont réceptionnés, triés, lavés, dépollués et compactés les millions de mégots collectés chaque année par la jeune entreprise brestoise. Née en 2017, MéGO est la première et la seule unité en France à s’attaquer aux traitement et recyclage de cette matière polluante et envahissante qu’est le mégot. Pour planter le décor : un seul mégot de cigarette a la capacité de polluer jusqu’à 500 litres d’eau avec les matières toxiques et métaux lourds qui le composent ; on estime à 8 millions le nombre de mégots jetés chaque minute dans le monde.

A la tête de MéGO, il y a Bastien Lucas, jeune dirigeant convaincu par le déploiement d’une économie écologique et responsable. En 2010, alors qu’il est tout juste diplômé de l’école de commerce de Brest, il créé Eco+Action, entreprise spécialisée dans le tri et le compactage des déchets administratifs. Sept ans plus tard, toujours animé par la volonté de donner du sens au tri, il fonde MéGO pour initier le recyclage des mégots de cigarettes.

      >>> Lire aussi : MéGO ! : la première usine de recyclage de mégots de France ouvre ses portes à Bourg-Blanc (29)

Process de neutralisation des matières polluantes

Depuis, l’amélioration continue de ce cycle de vie ne le quitte plus : « Accompagné par la Région Bretagne et plusieurs experts dont Labocéa, le Cèdre et l’Université Bretagne Occidentale, on a monté nos propres labos pour mener différentes études et élaborer des circuits fermés de dépollution. A partir d’un déchet toxique, on a réussi à trouver un process de neutralisation des matières polluantes, et ce sans introduction de produits chimiques« , se réjouit Bastien Lucas, dépositaire d’un brevet sur ce cycle singulier de propreté.

Déversés sur un tapis roulant, les mégots sont triés manuellement pour écarter les déchets intrus. Ils sont ensuite broyés puis immergés dans différents bains d’eau pour accélérer la dépollution du filtre. « 80% des molécules polluantes sont hydrophiles, elles se polarisent donc facilement au contact de l’eau« , explique Bastien Lucas. Séchée et à nouveau broyée, la pâte obtenue, riche en acétate de cellulose est alors thermocompressée pour être figée en plaques de plastique rigide de 2 cm d’épaisseur. Dépolluée, la matière ainsi obtenue ne contient plus que des traces de nicotine : 2 000 fois moins qu’une seule cigarette.

En 2019, MéGO a traité environ 9 tonnes de mégots, pour obtenir in fine 6 tonnes de matière recyclée. En 2020, près de 15 tonnes de mégots vont être collectées, soit plus de 10 tonnes de plastique recyclé. 

De la matière plastique recyclée pour fabriquer du mobilier urbain

Les plaques obtenues servent ensuite à fabriquer divers objets : des pompes de gel hydroalcoolique par exemple, et du mobilier urbain dont celui qui habillera bientôt les quais du Vendée Globe. CQFD.

« De plus en plus d’industriels s’intéressent à cette matière« , indique Bastien Lucas. Et de citer l’entreprise Eveno Fermetures à Ploemeur (56) pour des pièces de coffrage, et l’enseigniste Semios au Rheu (35). La diversification des matériaux désignés et fabriqués à partir de ce plastique recyclé est un axe de développement de MéGO, mais pas le seul ! Bastien Lucas actionne plusieurs leviers à la fois. La raison d’être de son entreprise tient dans un cercle vertueux et global. 

Vers des villes « Zéro mégot »

En amont du process, l’équipe de MéGO déploie des actions de sensibilisation pour inciter les fumeurs à écraser leurs cigarettes dans des cendriers dédiés à la collecte.Pour ce faire, l’entreprise a déployé un véritable réseau national de partenariats avec des entreprises, des collectivités territoriales, des communes pour développer la collecte, qui se fait… à vélo.

« On dispose de 7 concessions sur le territoire français, sur lesquelles sont installés nos cendriers logotés pour inciter au recyclage« , explique Bastien Lucas qui vise bien au-delà. « Nous travaillons sur la mise en place d’un label « Zéro mégots » dans les villes qui participent à la collecte, afin de véritablement déclencher une prise de conscience citoyenne sur la nocivité du mégot jeté au sol.« 

Objectif : aucun impact environnemental

En aval, Bastien Lucas et son équipe cherchent et développent toujours et encore des solutions naturelles pour dépolluer les résidus toxiques (formol, nicotine et hydrocarbure aromatique) logés dans l’eau des bains solvants. « On ajoute de l’argile afin de capter les déchets toxiques dilués« , explique ce diplômé de l’école de commerce devenu chimiste par la force de son entreprise et de ses convictions écologistes.

« L’eau clarifiée est réutilisée dans le circuit de dépollution. Les boues font l’objet d’une étude que nous menons avec l’ESIAB (école supérieure d’ingénieurs en agroalimentaire) et le Technopole Brest-Iroise pour trouver un intrant naturel qui favoriserait la dégradation des polluants identifiés. C’est un vrai casse-tête mais une véritable aventure humaine« , sourit l’entrepreneur qui tient à jour une analyse détaillée du cycle de vie de son process.

Recrutement et agrandissement

Dix personnes composent l’équipe qui entoure Bastien Lucas. Bénéficiaire du premier fonds Arkéa Phinoë, MéGO recrute 3 profils complémentaires : un technicien de tri, un ingénieur matériaux et un responsable du développement commercial. Des postes clés qui confirment la croissance de cette jeune pousse. « Ce fonds va aussi nous permettre de monter notre capital à 80 000€« , précise le gérant qui, en parallèle, planche sur le déménagement des bureaux et ateliers. « Nous allons construire un nouveau bâtiment dans le pays de Landerneau, un site mieux adapté à nos activités. » 

Le chiffre d’affaires de l’entreprise, 400 000€ en 2019, affiche une hausse continue. A cette progression chiffrée, Bastien Lucas apporte des indicateurs qui n’entrent pas dans le bilan comptable, mais qui influent sur la raison d’être de son entreprise : la responsabilisation écologique des citoyens. « Je ne sais pas si on va réussir à révolutionner l’ensemble du mouvement, mais chaque jour et à notre échelle, on amène au moins les fumeurs à se responsabiliser autour de leurs déchets. »

Voir le site MéGO !

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