Adelin Revault et François Bestué ont commencé à réparer leurs premiers téléphones au lycée, pour les copains. En parallèle de leurs études, IUT GEA à Rennes pour le premier, Master Finances à l’IAE de Poitiers, pour le second, ils ont monté l’un et l’autre une première entreprise. « Les gens n’arrêtaient pas de m’appeler, rapporte Adelin Revault. Ça devenait ingérable. Il fallait rapidement trouver une solution, créer une interface et automatiser le process de commande en ligne. C’est à ce moment que j’ai fait la rencontre de Kevin. Il développait des ERP depuis 10 ans. Il a monté un répertoire de smartphones, tous modèles et toutes marques confondues. L’aventure a démarré à trois. »
Déploiement d’un réseau de boutique
Nous sommes en mars 2020, Phoner voit le jour à Vitré, 10 jours avant la mise en arrêt d’une grande partie de l’économie. « On a commencé à travailler dans la cave de Kevin. On donnait rendez-vous à nos clients dans la rue. Avec du recul, je me dis qu’ils nous faisaient extrêmement confiance. » En juin 2020, le trio s’installe dans un appartement en plein cœur de Vitré. « Que ce soit pour la vente ou la réparation de téléphones, là encore, on fonctionnait sur rendez-vous. Très vite, on a commencé à proposer des accessoires. » Pour se faire connaître, ils sillonnent pendant un mois les marchés de la côte Atlantique avec leur caravane, « la « Phoner mobile » toute bleue repérable de loin. » L’expérience ne dure qu’un mois, mais permet aux trois associés de tester leur modèle.
En septembre 2021, ils ouvrent leur première boutique, sur fonds propres. « Au fur et à mesure que la trésorerie augmentait, on investissait dans des stocks. » En novembre 2021, une seconde boutique ouvre à Laval. C’est aussi à cette époque que Phoner développe un CRM sur mesure et commence à viser les flottes mobiles des entreprises. « On propose les mêmes services, mais cette fois aux PME et PMI du territoire, idéalement celles de plus de 150 salariés. » Aujourd’hui, Phoner collabore avec une centaine d’entreprises comme le groupe Ydeo, Okwind, le Crédit-Agricole Ille-et-Vilaine, Dalkia ou encore les Transports Lahaye.
Un millier de téléphones reconditionnés par mois
Fin 2022, le trio inaugure une troisième boutique, à Rennes. « Les gens viennent pour le conseil, des tarifs attractifs et un produit reconditionné. » Employant à cette époque une quinzaine de salariés, il devient urgent de déménager. L’opportunité se présente avec Vitré Communauté qui leur propose un espace de 400 m², en pleine zone d’activité. Aujourd’hui, six personnes sont en charge du reconditionnement. Chaque mois elle réceptionnent, testent et réparent un millier de téléphones. « On remplace l’écran, la batterie et les composants défectueux. Notre modèle est basé sur un service premium avec une batterie rechargée à hauteur de 95%, une garantie de 24 mois, des pièces d’origine, etc. » Les téléphones proviennent de diverses sources. « 20 % de notre approvisionnement provient des reprises des flottes d’entreprises et des clients en boutiques. Le reste, on travaille avec des brokers, des entreprises qui vont collecter des lots auprès des opérateurs. On en a en France, en Europe et aux USA. »
Une téléphonie de plus en plus circulaire
Depuis début 2024, Phoner a ouvert une 4e boutique à Nantes mais plus encore, a pris un nouveau virage en devenant opérateur télécom de proximité. « On passe par le réseau Orange mais c’est Phoner qui s’affiche. » Le trio propose des forfaits de 1 à 100 giga. « Les gens économisent de 5 à 10 euros sur un forfait. » En face, la demande est forte. « Les clients sont attirés par l’impact. Un smartphone émet entre 50 et 70 kg d’équivalent CO2, contre 10 à 13 kg pour un reconditionné. Logique, on a 80 % qui provient de la fabrication », poursuit Adelin Revault. Chez les entreprises, outre l’impact, c’est le service de bout en bout de la chaine qui les intéresse : reprise des téléphones, mise à disposition de nouveaux, réparation, maintenance, forfaits téléphone … « Tous leurs achats sont compilés dans un Dashboard. En fin d’année, on leur fournit un bilan de leur impact carbone qu’elles peuvent intégrer dans leur propre bilan RSE ».
Location, leasing et forfaits
Phoner mise de plus en plus sur la location et le leasing. « On se dirige vers une téléphonie très circulaire, avec des abonnements entre 5 € à 30 € par mois. L’impact d’un téléphone résidant dans sa production, si on maîtrise sa mise sur le marché et le reconditionnement, alors on devient très vertueux. Aujourd’hui, les mises à jour durent environ 5 ans. Mais la règlementation évolue, la durée s’allonge. » Les téléphones sont de plus en plus durables. » Phoner propose des modèles reconditionnés qui ont 7 à 8 ans. « On leur trouve un usage alternatif qui correspond à un usage spécifique pour l’entreprise. Par exemple, nous avons un client dans le nettoyage dont le besoin pour ses salariés consiste uniquement à réceptionner et passer des appels. »
Cette capacité à imaginer des solutions moins impactantes pour l’environnement séduit de plus en plus d’utilisateurs. Phoner ouvrira une cinquième boutique fin 2024 dans l’Ouest et vise un réseau de 25 points de vente d’ici 2030. L’ouverture d’une boutique, c’est deux emplois créés. » En parallèle, le trio table sur 100 000 téléphones reconditionnés par an d’ici cinq ans contre 10 000 aujourd’hui. « Depuis notre lancement, on double de taille chaque année », conclut fièrement Adelin Revault, qui souhaite avec ses associés devenir l’opérateur local de référence auprès des professionnels, pour une téléphonie mobile à faible impact carbone. Leur modèle a conquis le jury de Crisalide Eco-activité en juin 2024, concours organisé par Bretagne Compétitivité.