Reprendre, pour continuer à progresser

Cadre commercial pendant 20 ans dans l’agro-alimentaire, Bruno Lohezic a fait le choix en février 2009 de devenir son propre patron. 18 mois lui ont été nécessaires pour trouver et reprendre Maryvex, une TPE de 5 salariés et au CA de 3,5 millions d’euros, dans laquelle il souhaite donner du sens à l’action.

« Quand je me suis retrouvé en situation de rupture avec mon dernier employeur, raconte Bruno Lohezic, 45 ans, originaire de Questembert, j’ai décidé d’entamer un bilan de compétences. Très vite, avec mes accompagnateurs, il est apparu que la reprise d’entreprise était pour moi la meilleure façon de continuer à progresser. Dès lors je me suis formé et j’ai entamé, de façon empirique, mes recherches. Erreur ! Je n’avais pas la bonne boîte à outils. Toutes les infos que je trouvais étaient communiquées aux autres repreneurs potentiels. Il fallait donc chercher beaucoup plus en en-dessous. » C’est la découverte du CRA1 qui va permettre à notre quadra de prendre la mesure de la tâche. Il passe quatre semaines à Paris où il apprend quelques ficelles et astuces pour appréhender le marché de la transmission. « La condition non négociable pour réussir est d’abord de constituer sa Dream Team, composée d’un expert-comptable et d’un avocat. Il faut aussi et surtout se poser les bonnes questions, comme votre femme est-elle prête à vous suivre ? Ou avec combien êtes-vous capable de vivre ? Vous devez vous défaire de vos oripeaux de cadre commercial et tout ce qui va avec, et accepter l’idée de changer de réseaux. C’est simple, vous repartez à zéro. »

Se donner le temps sans pour autant devenir repreneur professionnel


Ces questions résolues, la recherche peut commencer avec deux outils essentiels, un CV et une fiche projet synthétique (secteur d’activité, taille, zone géographique …) à présenter aux cédants et aux cabinets de transmission. « Je passais toujours par quelqu’un qui m’introduisait. J’ai rencontré presque tous les cabinets de transmission existants en Bretagne, mais aussi à Nantes et Caen, car je m’étais fixé le Grand Ouest, de préférence dans l’agro-alimentaire. Ces spécialistes de la transmission facilitent le travail en préparant le vendeur et en adoubant le repreneur. Je visais une TPE d’environ 1 million d’euros. Je pense que j’ai dû agacer car j’ai ouvert une cinquantaine de dossiers, en ai regardé 35 et me suis vraiment intéressé à 10. En fin de compte, je peux dire que je me suis réellement projeté dans 5 d’entre eux. Dans une démarche de reprise, il est indispensable de courir plusieurs lièvres à la fois. En effet pour les bons projets, les cédants ont souvent plusieurs repreneurs. Il m’est arrivé une fois d’y croire, d’obtenir le financement mais au bout du bout, après 4 mois d’échanges et de négociations, le dossier m’a claqué entre les doigts, le vendeur estimant que je n’étais pas le bon candidat. En avançant dans vos recherches vous devenez de plus exigeant et de plus en plus affûté. Lors du premier rendez-vous, je cherchais toujours à me vendre, à me mettre en confiance, à m’intéresser au parcours du cédant, à l’activité et au marché de l’entreprise. Par contre, lors du suivant, je venais avec mon expert-comptable auquel je laissais le soin de poser les questions dérangeantes, celles sur les chiffres. »

Le bon dossier : Maryvex à Lorient


« J’ai bouclé une première année de recherche, durant laquelle j’ai beaucoup appris mais il fallait que je sois vigilant à ne pas devenir repreneur professionnel. » C’est en juillet 2010 que Bruno Lohezic a pris connaissance par l’intermédiaire du cabinet Richemont (Vannes) du « dossier » Maryvex. Entreprise spécialisée dans le négoce et la commercialisation de produits de la mer frais et congelés à destination des IAA, cette TPE de 5 salariés avait été créée à Lorient dès 1975 par Dominique Dichamps. « Maryvex répondait aux critères que j’avais défini : secteur en amont d’une activité que j’avais déjà pratiqué, travaillant en B to B ; petite structure basée en Bretagne sud disposant d’un potentiel à l’international. Il n’y avait pas d’outil de production et cela rentrait aussi dans mes critères. J’étais dans une démarche de super directeur commercial et l’expertise produit était assurée par l’équipe. Enfin l’entreprise était rentable, condition indispensable pour constituer un LBO. Après deux rendez-vous concluant, tout est allé très vite. »

Patron à la signature du chèque


Bruno Lohezic n’a rencontré aucune difficulté pour obtenir son financement. Il a obtenu le soutien de deux banques, la sienne et celle du cédant, mais aussi d’Oséo, de la Plateforme Pays de Lorient Initiative et du fonds Brit2. « Toutes ces structures, j’ai appris à les connaître durant mes 18 mois de recherche. Vouloir reprendre une entreprise, c’est un travail à temps plein, c’est se mettre en permanence en position de vendeur et donc accepter de prendre des coups. » La signature du protocole a eu lieu en octobre 2010 et la remise du chèque en décembre. « J’ai rencontré l’équipe mi-novembre, ce qui était plutôt bien vu de la part du cédant. Vous taillez votre costume de patron et vous rentrez vraiment dedans quand vous signez le chèque. L’accompagnement a duré 3 mois jusqu’à début avril 2011. Durant cette période, vous observez et notez tout ce que vous pouvez optimiser. Il faut repartir à zéro, accepter de na pas avoir les coudés franches même en étant patron. Aujourd’hui je m’apprête à boucler mon premier exercice qui je dois le dire, ne fait pas apparaître de baisse du CA comme je l’avais indiqué dans mon prévisionnel. J’en suis encore au stade des réglages tout en mûrissant déjà un certain nombre d’idées pour développer mon entreprise. Vous savez, avec le poisson, on peut faire beaucoup de choses ! » En attendant le deuxième exercice, celui des décisions, Bruno Lohezic se concentre quotidiennement sur ses deux outils de pilotage : le point mort et la trésorerie.

Véronique Maignant


Bretagne Economique n°211 Décembre 2011/ Janvier 2012

1Cédants et repreneurs d’affaires, association nationale pour la transmission d’entreprise


2 Créé début 2007 par la Région Bretagne et la Caisse des dépôts, le fonds financier BRIT (Bretagne Reprise Initiative Transmission) a pour vocation de faciliter la reprise et la transmission des toutes petites entreprises (TPE) bretonnes

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