Le Manoir de la Noë Verte (22). Avec la crise du Covid-19, la passion vire au cauchemar

Le Manoir de la Noë Verte à Lanloup Plouha (22) dans les Côtes d’Armor est devenu un haut lieu de réception qui rayonne en Bretagne et au-delà puisque 50 % de sa clientèle est internationale.  Marie Boutbien a racheté cette bâtisse du 15ème siècle et son parc de 5 ha à ses parents, dans les années 90. Depuis presque un an, l'arrêt forcé de son activité est une véritable épreuve morale. Sa trésorerie fond comme neige au soleil. Une grande partie des mariages annulés en 2020 ont été reportés en 2021. Mais la pandémie est toujours là. A quand la réouverture ?

Depuis le début de l’année Marie Boutbien gère quotidiennement des appels de futurs mariés en larmes. « Jusqu’à fin 2020, on trouvait une solution pour reporter la date du mariage. Aujourd’hui, certains d’entre eux ont perdu leur emploi et ne peuvent tout simplement plus payer. C’est l’effet boomerang de cette crise. Je suis totalement démuni. Il faut que je travaille en 2021 sinon je serai dans l’obligation de prendre des décisions terribles. Je continue à entretenir comme si j’allais bientôt rouvrir, mais c’est moralement très éprouvant. Sans mes proches et mon équipe, je serais incapable de tenir », raconte-t-elle.

 

Une prestation complète

A force d’envie et de travail, Marie Boutbien avait, jusqu’ici, réussi à faire prospérer le Manoir de la Noë Verte, devenu en quelques années un lieu d’exception pour les mariages. Construit au cœur d’un parc de 5 ha, il est situé à 100 m de la mer, entre Paimpol et Binic, à proximité de la Côte de granit rose. Lorsque ses parents l’ont acheté en 1971, c’était une ruine. « Il ont mis une vingtaine d’années à tout reconstruire, en louant une partie des pièces restaurées. En travaillant comme extra les week-ends pour des traiteurs, j’ai découvert le métier. Il est devenu une passion. » Elle reprend le flambeau dans les années 90. La transformation complète prendra quelques années mais très vite le bouche à oreilles porte ses fruits. « Nous proposons une prestation complète : traiteur, serveur, garde d’enfants, décoration, fleuriste,  DJ, chambres d’hôtes…C’est un peu le club Med. Je conseille les familles et les accompagne sous tous les aspects de l’évènement »

 

40 à 50 mariages chaque année

Avec un tel niveau de prestation, la clientèle est de plus en plus internationale.  « J’ai énormément de couples mixtes. Des jeunes Bretons qui se sont expatriés durant leurs études et reviennent se marier sur leur terre d’origine. Les anglais aussi sont nombreux. Ils en profitent pour découvrir la région. » En moyenne, depuis ces dix dernières années, la maîtresse des lieux organise entre 40 et 50 mariages par an, les week-ends, mais aussi en semaine, au plus fort de la saison. Constituée de 5 salariés permanents, son équipe monte alors jusqu’à une vingtaine de personnes. « La saison démarre en avril pour s’achever en octobre. Le reste du temps, ma priorité c’est l’entretien. Du fait de l’ancienneté du lieu, deux mois de travaux sont nécessaires chaque année et l’addition s’envole très vite. Avant que la Covid-19 arrive, j’étais sur une bonne dynamique avec une progression du chiffre d’affaires et de la qualité des prestations. Cette notoriété est une vraie fierté, m’anime en permanence, moi et mon équipe. »

 

Un protocole sanitaire inapplicable

Fermé en mars 2020, le manoir a pu rouvrir à la mi-juillet non sans avoir fait contrôler, par un huissier, le protocole sanitaire mis en place. « Ce n’était pas une obligation, mais je ne voulais prendre aucun risque. J’en veux au Gouvernement parce qu’il nous a laissés ouvrir avec un protocole sanitaire inapplicable dans le cadre d’un mariage : masque obligatoire, un mètre de distance social entre chaque convive, cocktail assis, interdiction d’activité dansante, etc. Croyez-vous un instant que j’étais en mesure d’interdire aux familles de s’embrasser et faire la fête ? Comment le Gouvernement a- t-il pu nous laisser porter seuls cette responsabilité ? J’ai eu extrêmement peur pour mon équipe, mes clients, leurs convives et la notoriété de mon établissement. En cas de cluster, ma responsabilité pénale était engagée », confie-t-elle.  Marie Boutbien a ainsi maintenu 5 mariages durant l’été 2020, à la demande des clients.

Mais fin août, devant le danger encouru, l’indiscipline de certains clients et l’annonce de l’arrivée de la seconde vague, elle a décidé de fermer son établissement. Les mariages de septembre et d’octobre ont été reportés. « C’était la meilleure décision que je puisse prendre, car en octobre, le protocole a de nouveau évolué. Nous sommes passés de tables de 10 à 6 personnes avec une fin des festivités à 21h30. Autant vous dire qu’aucun couple n’aurait accepté de se marier dans ces conditions. » Au final, le gouvernement décidera de la fermeture administrative de tous les établissements accueillant du public fin octobre 2020. « Pour moi ça a été un véritable soulagement. J’ai enfin pu toucher des aides auxquelles je n’avais pas eu droit jusque-là, à l’exception du chômage partiel pour mes salariés et d’un PGE. »

Aujourd’hui, Marie Boutbien est moralement atteinte. Les factures d’entretien continuent de tomber. « C’est par exemple un mur qui vient de s’écrouler du fait des intempéries et que je dois remplacer. Montant de la facture : 40 000 euros. J’ai perdu plusieurs années de trésorerie en quelques mois. Malgré tout, j’ai choisi ce métier pour faire rêver les gens. Je vais tout mettre en oeuvre pour continuer sur cette voie  et remettre en selle toute mon équipe », conclut-elle.

Découvrir le Manoir de la Noë Verte

 


Ce témoignage fait suite à un des nombreux appels passés par les conseillers de la CCI des Côtes d’Armor, fin 2020, pour soutenir les entreprises impactées par la crise du Covid-19.

En complément, une cellule d’écoute avec numéro d’appel unique a été mis en place : 02 96 78 62 00

 

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