En pleine croissance, les sociétés bretonnes SCB et GRV prennent le virage du bas carbone

L’ensemble des bassins granitiers de Bretagne couvrent 40% de la production nationale de granit voirie. Réunissant une vingtaine d’entreprises, la filière s’organise pour convaincre les collectivités d'acheter local. Une étude sur le coût social et environnemental d’un granit produit et transformé hors de France est sur le point de paraître. Membres de l’association IG Granit de Bretagne, les sociétés SCB et Granits Rébillon Voirie pilotées par Matthieu Goudal investissent aussi dans un mode de transport durable. Prochainement, 10% des pavés, dalles et autres bordures produites à Maen-Roch (35) près de Fougères transiteront par la ligne multimodal Rennes-Lyon. A plus long terme, il devrait en être de même avec la ligne Rennes-Lille. La démarche séduit les collectivités, malgré des produits espagnols ou portugais 27 % moins chers.

Formé à l’électronique, Matthieu Goudal n’avait jamais imaginé travailler un jour dans le granit.  Quand il intègre, il y a une quinzaine d’années, une entreprise concurrente également installée dans le bassin de Fougères, c’est pour piloter une machine à commande numérique et pallier des compétences dans une filière sous équipée. Il se prend au jeu et finit par maitriser l’ensemble de la chaine, de l’extraction à la transformation. Fort de cette expérience, il devient en 2021, Directeur d’exploitation Granits de SCB-Granit Rébillon Voirie (GRV), propriétés du groupe Gagneraud et de sa filiale Marc SA. L’ensemble représente une quarantaine de collaborateurs répartis sur 5 sites en Bretagne et pèse 4,2 millions d’euros de chiffre d’affaires. « Nous connaissons une très forte activité et nous dépasserons les 5 millions d’euros en 2023.  Je suis serein jusqu’à mi-2024. », rapporte-t-il.

Investir en jouant la carte du local

Sur les cinq carrières bretonnes exploitées par SCB, deux disposent d’un atelier de transformation. Le plus important est celui de GRV, situé à Maen-Roch siège social de l’entreprise. Il emploie une vingtaine de salariés pour un chiffre d’affaires de 3,6 millions d’euros. Le mobilier urbain représente 10 % de l’activité, les pavés et boutisses 30 %, les bordures 30 % et les dalles 30 %. En 2021, ce site a bénéficié d’une aide de 740 000 euros du plan de France Relance sur une enveloppe globale de 2 millions d’euros d’investissement. « Nous venons d’achever la première phase. Notre fournisseur de machines à commande numérique est français.  Cette préférence nationale, même si elle entraîne un surcoût de 20 à 25% sur le prix d’achat, raisonne avec nos valeurs au quotidien, à savoir privilégier le local pour réduire notre empreinte carbone. De plus, avec un constructeur qui parle votre langue, on s’achète une sécurité pour les 10 prochaines années ! » La seconde vague d’investissement est en cours. « Pour gagner en compétitivité, nous devons augmenter nos volumes et donc automatiser notre production. Nous avons un retard important sur nos concurrents espagnols et portugais.  Avec ces nouvelles machines, on réduit aussi la pénibilité au travail ainsi que notre facture énergétique d’environ 25%. »

 

 

Un rayonnement national

Le marché breton représente 25% à 30% du chiffre d’affaires de GRV. « Aujourd’hui, notre rayonnement est national avec des marchés passés avec les métropoles de Rennes, Paris, Lille et plus récemment Lyon. Notre forte synergie avec les carrières de granit bretonnes et la garantie de traçabilité des matériaux puisque, depuis 2017, nous sommes membres actifs de l’Indication Géographique Granit de Bretagne* (IG GB), dopent notre croissance, souligne Matthieu Goudal, également président de l’association qui porte cette indication. Notre objectif, avec l’ensemble de la profession est de travailler de plus en plus en direct avec le client final à savoir les services de voiries des collectivités, sans passer par les entreprises de travaux publics. C’est essentiel si on veut les convaincre d’acheter nos granits produits et transformés à 100 % en local et ne pas se faire doubler par les portugais ou les espagnols, voire les chinois. »

 

Se protéger d’une concurrence internationale à bas prix

Pour ce faire, avec le concours de la Cellule économique de Bretagne, l’association a mesuré le prix du granit en provenance de l’étranger en y intégrant le coût social et environnemental. « Nous nous sommes basés sur un prix fictif d’un chantier nécessitant 5 000 m² de pavés. Nous avons intégré le prix du transport, le coût carbone, la TVA non payée, les recettes fiscales en moins, les emplois détruits, etc. Résultat : les produits étrangers coûtent 27 % plus chers à la société. » Cette étude, également portée par le Syndicat national des roches ornementales de construction, une des branches de l’Unicem,  va bientôt faire l’objet d’une vaste communication. Avec ces arguments, les acteurs de la filière espèrent aussi convaincre de plus en plus de collectivités d’acheter breton.

 

10 % des chargements par ferroutage

 

En parallèle, SCB-GRV se lance dans le ferroutage pour ses livraisons sur la plateforme de Vénissieux à Lyon. Elles transiteront d’ici deux à trois semaines via la ligne multimodale opérée par le Groupe Lahaye au départ de Rennes. Le carnet de produits est récurrent, ce qui facilite sa mise en œuvre « Nous avions des craintes notamment en termes de respect des horaires. Mais après nos différents échanges avec le transporteur,  nous sommes rassurés. En 2024, nous allons opérer une trentaine de chargements par le ferroviaire, ce qui représentera environ 10 % du total de nos livraisons. » La prochaine étape consistera à faire de même avec une partie des marchés, lillois via la seconde ligne de ferroutage récemment ouverte par le groupe Lahaye. « Globalement, ce type de transport coûte environ 30% plus cher, mais varie en fonction de l’indice gasoil. C’est un investissement sur le long terme, en faveur de la planète. »

 

Les principaux chantiers en cours de GRV sont, à Rennes, le marché d’entretien à Paris, le dallage d’une grande place porte de la Chapelle, à Saint-Malo, une partie du sillon  et enfin à Lille, en groupement avec Général de Granit (35), la poursuite du chantier de l’axe principal de la métropole, à savoir l’avenue Pierre Mauroy commencée en 2019. « En se regroupant avec d’autres entreprises bretonnes, on sécurise l’approvisionnement de nos marchés. » L’entreprise vise également le boulevard Douville à Saint-Malo et  le futur pôle d’échange multimodal de Vannes. « C’est un challenge pour nous car c’est le seul département breton ou nous ne sommes pas présents. A cette occasion, nous prescrirons un nouveau produit », conclut Matthieu Goudal. Très investi sur le territoire de Fougères, l’homme fait régulièrement appel à l’expertise de Jean-Louis Turmel, responsable de la Délégation des Marches de Bretagne à la CCI Ille-et-Vilaine.


*Cette IG a pour objectif de protéger les granits extraits de carrières implantées en Bretagne et dans la commune de Saint-James (50), ainsi que les produits fabriqués à partir de ces granits, dans cette même zone géographique, et de garantir l’authenticité des produits mis sur le marché.

Évènements

AGENDA DES ÉVÈNEMENTS À VENIR

Palmares
des entreprises
bretonnes

PALMARES 2023-2024 Je commande

Bretagne Économique