Coronavirus : « il est essentiel ne pas laisser la peur de la faillite s’installer », selon Sophie Gautier, administrateur judiciaire à Rennes

Le Conseil National des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires (CNAJMJ) lance une vaste opération nationale de soutien aux entreprises. Dès aujourd’hui et pour une durée illimitée, toutes les entreprises ou leurs conseils, quel que soit le secteur d’activité, peuvent composer le numéro vert gratuit « 0 800 94 25 64 ». Objectif : les aider au décryptages des mesures de soutien déjà adoptées par le Gouvernement mais surtout les orienter dès à présent vers les dispositifs les mieux adaptés au traitement de leur situation particulière. Explications avec Sophie Gautier, administrateur judiciaire à Rennes

 

Sur le plan pratique, comment se déroule cette opération ?

Dans chaque région, la quasi-totalité de la profession s’est portée volontaire.  Nous sommes  568 administrateurs judiciaires et mandataires judiciaires en France.  Le numéro vert est actif depuis ce matin, avec les 100 premiers volontaires dont les 16 élus du conseil national des AJMJ.  Ensuite, par deux groupes de 20 minimum, nous nous relaierons chaque jour ouvré de la semaine, pendant toute la durée de la crise sanitaire. Cette opération est menée conjointement avec le Ministère de l’Economie et des Finances et la Conférence générale des juges consulaires. Toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d’activité, peuvent nous appeler y compris les exploitants agricoles,  les éleveurs et les professionnels de la pêche, particulièrement nombreux en Bretagne.

 

Que retenir des mesures de soutien prises par le gouvernement ? 

Les mesures de soutien, notamment le gel des échéances fiscales et sociales, l’accès facilité et rapide à l’activité partielle, les garanties Bpi à l’appui du maintien ou du renforcement des concours court terme, les nouveaux prêts vont permettre de stabiliser les trésoreries durant la période de cessation ou réduction drastique de l’activité. Il faut donc que les entreprises s’en saisissent au plus vite !  

Cependant, à ce stade, il s’agit pour l’essentiel de mesures de report d’échéances et non pas d’abandon. Ces créances reportées viendront alourdir l’endettement des entreprises dans un contexte de fort ralentissement de la croissance et des résultats, voire de récession.   Il importe que lors de la reprise des activités, les entrepreneurs puissent se consacrer pleinement au redémarrage, que les liquidités soient affectées en priorité à la relance et que les échéances fournisseurs soient assurées en priorité pour ne pas créer une spirale infernale de dégradation des paiements interentreprises.

 

Comment éviter le dépôt de bilan lors de la reprise d’activité ?

Dans ce contexte, il faudra se polariser aux côtés du chef d’entreprise sur le traitement de l’endettement, réaménagement des créances sociales et fiscales dans le cadre de négociations avec les administrations ou de plans CCSF, de l’endettement bancaire avec possiblement des rallongements des périodes de gel, et très probablement au-delà de la période de gel, réaménager des échéanciers à des niveaux et dans des conditions compatibles avec les futurs cash-flows.  En effet, les cash-flows de demain seront probablement, dans la plupart des cas, éloignés des perspectives de résultats projetés avant crise.

 Il sera donc nécessaire de négocier avec les créanciers un certain nombre de leviers, voire de les mixer : Reconstitution du BFR, crédit de consolidation de ligne court terme, restructuration des crédits moyen terme existant en délai voire en montant, et dans des proportions et sur des durées compatibles à la capacité contributive des entreprises après crise.

Il faudra crédibiliser les BP post reprise avec des indicateurs précis, et permettre une répartition équitable des efforts entre les différents acteurs dans un contexte de confiance réciproque, nécessitant le partage d’une information fiabilisée.

 

Quelle procédure vous semble la mieux adaptée ?

Le cadre le plus adapté sera certainement le mandat ad hoc : Il s’agit d’une procédure confidentielle, ouverte en quelques jours sur simple requête auprès du Président du Tribunal de Commerce, permettant au chef d’entreprise de se faire assister par le professionnel de son choix pour poser le bon diagnostic et pour proposer des solutions.

Il s’agira en particulier d’obtenir des délais de paiement significatifs de la part des banques, consolider des crédits bancaires, restructurer des dettes afin de les mettre en adéquation avec des capacités de remboursement dégradées, obtenir des administrations fiscales et sociales des délais voire des remises au-delà des premières mesures actuelles, sécuriser les apports financiers, voire engager dans ce cadre confidentiel toute discussion avec ses bailleurs, clients et/ou fournisseurs sur des difficultés contractuelles avant d’entamer un contentieux.

Outre sa rapidité et son efficacité, ce dispositif a l’avantage de la sécurité et de la durabilité.

 

Comment les entreprises peuvent bénéficier du mandat ad hoc ?

Compte tenu de l’intérêt qu’il y a à pouvoir bénéficier au plus tôt d’un mandat ad hoc dans le cadre de la crise sanitaire actuelle (l’entreprise ne doit pas être en cessation des paiements pour en bénéficier), une circulaire gouvernementale du 19 mars dernier ouvre la possibilité d’ouvrir ces procédures dès à présent.  La voie dématérialisée est rendue possible.

Les Présidents de juridiction concernés, Tribunaux de Commerce et Tribunaux Judiciaires, avec le concours des greffiers, se préparent donc à traiter au plus vite toutes les requêtes d’ouverture de mandat ad hoc qui pourront leur être transmises par simple mail et instruites par le Président après organisation d’un entretien téléphonique avec le dirigeant, le cas échéant en compagnie de son conseil.

Ces procédures pourront être ouvertes sur le fondement des dispositions de l’article L611-3 du Code de Commerce mais aussi L351-1 du Code Rural ou de la Pêche permettant également aux exploitants en détresse (entreprise agricole ou du secteur de pêche) d’en bénéficier.

En appelant sur le numéro vert mis en place par le CNAJMJ, tout renseignement pourra être donné sur les termes de cette requête, son coût et les modalités pratiques d’intervention. Il ne faut donc pas hésiter à poser ces questions au téléphone aux professionnels mobilisés dans le cadre de ce dispositif.

 

Les entreprises déjà fragilisées (avant la crise) pourront-elles aussi prétendre à ce dispositif ?

En appelant sur le numéro vert mis en place par le CNAJMJ, tout renseignement pourra être donné sur les termes de cette requête, son coût et les modalités pratiques d’intervention. Il ne faut donc pas hésiter à poser la question dans le cadre de ce dispositif.

Des réponses utiles pourront être également apportées pour répondre aux spécificités des entreprises déjà fragilisées précédemment, qu’elles soient en tension de trésorerie mais sans procédure particulière, ou déjà dans le cadre d’une procédure de prévention, ou en procédure collective (sauvegarde ou redressement judiciaire), ou qu’elles bénéficient d’un plan de continuation, des dispositions étant attendues devant permettre le report d’un certain nombre de délais. Il est essentiel de ne pas laisser une crise économique se propager et la peur de la faillite s’installer. C’est tout l’objet de cette vaste opération de soutien que nous mettons en place pour une durée illimitée.

Afin de bénéficier des conseils des administrateurs et mandataires judiciaires composez le numéro vert gratuit  0 800 94 25 64 du lundi au vendredi de 10h à 17 h

Conseil National des Administrateurs Judiciaires et Mandataires Judiciaires (CNAJMJ)

 

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