En France, 75 % des industriels sont basés dans des communes de moins de 20 000 habitants. C’est particulièrement vrai en Bretagne où ce réseau des petites villes a favorisé l’implantation de nombreuses PME industrielles et offert une alternative de développement à une trop forte métropolisation. Mais cet équilibre est fragile, surtout à l’heure où l’on parle de relocalisation, de réindustrialisation et alors que le foncier vient à manquer. Comment continuer à attirer des actifs dans ces petites villes parfois mal desservies et où certains services font défaut ? La question a été débattue, ce jeudi 15 septembre à Dinan, à l’occasion des 24es assises des Petites villes de France, en présence de la secrétaire d'Etat chargée de la Ruralité et de nombreux élus. Retour sur cet évènement avec Jean-Pierre Rivery, Président de la CCI Bretagne et intervenant à la table ronde.
L’impératif de réindustrialisation, renforcé par la crise sanitaire, est une occasion unique de raccrocher les territoires, ruraux et villes moyennes, au récit de notre développement économique. « Le projet de reconquête industrielle de la France se joue en 4 étapes : le foncier, la formation, la requalification des centres villes et l’attractivité, a déclaré Dominique Faure, Secrétaire d’Etat chargée de la Ruralité, présente ce 15 septembre à Dinan. Jamais autant d’argent n’a été injecté pour accompagner nos centres villes. Je serai celle au gouvernement qui veillera à ce que l’industrie s’installe dans nos territoires ruraux. » De son côté, Olivier Sichel, Directeur de la Banque des Territoires, relevait : « aujourd’hui, nous créons plus d’usines que nous n’en fermons. La mécanique s’inverse. Tous les indicateurs sont au vert pour permettre à nos teritoires la reconquête industrielle ».
L’agroalimentaire breton a favorisé le développement des petites villes
Aujourd’hui, 75 % des emplois industriels français sont situés en dehors des métropoles et 71 % des projets d’investissements industriels étrangers se réalisent dans des communes de moins de 20 000 habitants. « En Bretagne, la vitalité de ce réseau de petites villes tient beaucoup au développement de l’industrie agroalimentaire qui s’est installée à proximité des productions agricoles et des ports de pêche. Elle représente plus de 60 000 emplois et 3 800 établissements, la plupart de petite taille », explique Jean-Pierre Rivery, Président de la CCI Bretagne. Autour de l’agroalimentaire et de l’agriculture s’est développée une activité de matériel agricole et d’équipements industriels, là aussi dans les petites villes. Mais cet équilibre est fragile dans une économie mondialisée où la compétitivité des entreprises reste conditionnée à la facilité d’accès aux marchés internationaux et aux approvisionnements en matières premières ou composants industriels. « Même si beaucoup d’argent a été investi dans les infrastructures par l’Etat, la Région et les Départements, des efforts restent à faire pour irriguer le centre Bretagne et connecter l’Ouest Breton. »
Le foncier, 1er levier à la reconquête industrielle
Chez tous les intervenants de cette table ronde présents à Dinan ce 15 septembre*, la prise de conscience à se réarmer sur tous les secteurs stratégiques pour éviter les délais, les surcoûts énergétiques et au final les émissions des gaz à effet de serre est générale. En parallèle, tous pointent la capacité foncière nécessaire pour accueillir de nouveaux projets industriels, alors même que pèse la contrainte de ne pas consommer de foncier agricole qui nourrit lui-même l’industrie agroalimentaire. Il s’agit aussi de conserver des espaces naturels qui participent à l’attractivité de la Bretagne pour les salariés et les touristes. « Chaque année, 15 000 nouveaux habitants s’installent en Bretagne. Des arbitrages seront nécessaires entre les différents territoires dans la consommation nette de foncier », poursuit Jean-Pierre Rivery. A cet enjeu s’ajoute celui de l’accès à l’eau. Face à l’accélération des périodes de sécheresse et des restrictions d’usage de l’eau, les entreprises, notamment celles de l’agroalimentaire et du tourisme vont devoir réduire leur consommation. « A travers le programme ECOD’O, les CCI les y incitent et les conseillent. L’objectif est de baisser de 10 à 20% la consommation d’eau par l’industrie. » Enfin, pour accueillir de nouveaux projets industriels, la Bretagne doit continuer à réduire sa dépendance énergétique à travers le développement des énergies renouvelables : solaire, éoliens terrestre et en mer, méthanisation.
Rétablir l’attractivité des petites villes
Prétendre à la reconquête industrielle, c’est aussi être en mesure d’attirer des actifs. « C’est d’autant plus vrai que notre région présente le taux de chômage le plus de France à 5,8%. » Tous les acteurs sont concernés pour rétablir l’attractivité des petites villes : les chefs d’entreprise pour que leur établissement et leur métier intéressent les actifs, les pouvoirs publics pour que leur ville soit bien desservie en transports, propose des logements, fournisse des services, propose une animation culturelle, des activités associatives, etc. Afin de contribuer aussi à la revitalisation des centres-villes, notamment dans les opérations « Petites Villes de Demain », les CCI ont créé un outil numérique et cartographique d’observation fine du commerce, appelé Viz’up. « C’est un outil performant qui livre l’ensemble des données économiques par rue ou par quartier, par types de commerce. Il permet d’établir un diagnostic et d’identifier les leviers de développement. »
« Les petites villes constituent un véritable maillage du territoire, facilitant l’accès des habitants et des entreprises aux services publics et privés (commerce). Elles contribuent à fixer partout des populations et des activités économiques. En ce sens, elles sont actrices majeures de l’équilibre territorial », conclut Jean-Pierre Rivery.
*Dominique Faure, Secrétaire d’Etat chargée de la Ruralité , Harold Huwart, Maire Nogent-Le-Rotrou, Guillaume Basset, Adjoint à la direction Générale de Business France, Olivier Sichel, Directeur Général délégué de la Caisse des dépôts / Directeur de la Banque des territoires et Jean-Pierre Rivery, Président de la CCI Bretagne