L’Open de l’industrie, le rendez-vous annuel des industriels bretons s’est tenu à Saint-Brieuc, ce jeudi 13 octobre. Près de 500 dirigeants et représentants du monde économique avaient fait le déplacement. Si la « hausse disproportionnée des coûts de l’énergie » était dans tous les esprits, l’urgence à relever les multiples défis, stratégiques, technologiques, environnementaux, etc. n’en est pas moins restée la priorité de la journée. La cérémonie des Trophées Crisalide Industrie a constitué un des temps forts de la journée avec la consécration de quatre pépites bretonnes : 3D TEX (35), TYK Affinage (56), Bord à Bord (22) et Gwilen (29).
Avec pour ambition de soutenir, accompagner et dynamiser l’industrie bretonne, les partenaires de l’Open de l’industrie* ont témoigné durant cette journée de cette énergie résiliente qui permet d’avancer. « La prise de conscience des industriel bretons face au changement climatique est bien réelle. Pour autant, 2/3 des participants présents à la table ronde sur » la Bretagne industrielle face aux enjeux des transitions » ont admis ne pas avoir encore enclencher de réflexion sur le sujet. Ils n’ont tout simplement pas le temps. A nous de les accompagner et de les initier », indique Philippe Martineau, président de Bretagne compétitivité, un opérateur de la CCI Bretagne.
Parmi les dispositifs déployés en région pour aider les entreprises bretonnes à se transformer, il y a Crisalide Industrie. 19 TPE/PME ont candidaté à l’occasion de cette 5e édition. Au final, seules quatre d’entre elles ont reçu un trophée des mains des financeurs et partenaires des différents financeurs.
Catégorie Compétitivité par l’innovation : 3D TEX à Saint-Malo (35)
Fondée en juin 2020 par Basile Riquier, Marc Sabardeil et Gwendal Michel, 3D Tex abrite une usine « dernière génération », entièrement automatisée, qui fabrique des pulls sans couture grâce à une technologie 3D, et zéro déchet. L’entreprise a livré ses premières commandes mi 2021. Elle vise un chiffre d’affaires de 1,4 million d’euros fin 2022. Il était quasiment nul en 2021. « On se définit comme une startup industrielle, capable de proposer des délais de fabrication les plus courts du marché à savoir moins d’1 mois contre 2 à 6 mois pour la concurrence qui est mondiale ». Les prix se veulent accessibles pour démocratiser la fabrication française et inciter les futurs clients à placer des volumes en France. 3D TEX table sur environ 60 000 pièces de tricot par an, en 3D.
Aujourd’hui, 35 personnes, travaillent dans l’atelier. « Nous soustraitons 15% de la production auprès de certains Esat. Notre objectif est d’atteindre 30% et de devenir une entreprise adaptée. » L’entreprise travaille aussi en lien avec la Région, les OPCO et les syndicats professionnels à remettre en place des filières de formation textile, niveau Bac pro. « Avec la désindustrialisation, elles ont complètement disparu. » Installé dans une atelier de 700 m² à Saint-Malo, elle annonce également son déménagement courant 2023 . « Le terrain est trouvé. Nous restons à Saint-Malo. »
Autre projet en cours : la création d’une cellule R&D avec un équipementier français de l’automobile. « Nous allons travailler sur la réalisation de certaines parties du textile nécessaires à l’habillage d’une voiture, comme la coiffe de siège par exemple », conclut Basile Riquier pour qui l’objectif d’une centaine de salariés pour un chiffre d’affaires de 6 millions d’euros est toujours atteignable. « Quelque que soit le secteur, il est possible de relocaliser en France, à condition d’être performant d’un point de vue économique, environnemental et social. »
Compétitivité par la sobriété : TYK Affinage (56)
Vegans Manon Boucand et David Vigent, ont créé Tyk Affinage en mars 2020. La TPE, basée à Vannes, fabrique des fromages végétaliens affinés bios, éthiques et zéro déchet, fabriqués en Bretagne. La marque propose toute une gamme d’alternatives au fromage, qu’elles soient à pâte molle ou persillée.
« La méthode de fabrication est la même que pour un fromage « classique », sauf qu’à la place du lait, on utilise une pâte de noix de cajou, à laquelle on ajoute des ferments identiques à ceux utilisés dans la fabrication du fromage. Une fois confectionnés, on les place en cave d’affinage durant une dizaine de jours », détaille Manon Boucaud, cofondatrice avec David Vigent. Le couple souhaite démontrer que la cuisine 100 % végétale est l’avenir de l’alimentation traditionnelle. Si les premiers fromages étaient initialement destinés aux amis et produits à la maison, la demande à peu à peu explosé.
Pour faire face à l’afflux de commandes, le couple a créé un laboratoire dans les locaux de Créalis, la pépinière d’entreprises vannetaise à la sortie du confinement. De 200 fromages par mois, la production est passée à 1 700. Ils sont vendus à travers une trentaine de points de vente à travers toute la France.
Outre le fait de proposer une alternative végétale, Tyk Affinage tend également vers le « zéro déchet ». Tous les emballages sont 100% compostables, de la production à la feuille transparente qui recouvre le fromage qui est en cellulose de bois. Tout est réfléchi pour minimiser les déchets. Toutes les matières premières sont biologiques. Leur fournisseur de noix de cajou, originaire de Nantes, est un jeune entrepreneur attaché à la Casamance, une région du Sénégal. Le cueillage et le décorticage se font sur place. Le transport, assuré par bateau, se fait directement du Sénégal à la France. « Aujourd’hui, nous réfléchissons à travailler avec des ingrédients plus locaux , 100 % français. » Dans ce sens un responsable R&D a rejoint le couple.
Compétitivité par la diversification : Bord à Bord (22)
Le chantier de construction naval situé à Plestin les Grèves commercialise des bateaux en aluminium professionnels et de plaisance de 5 à 18 m de long depuis une vingtaine d’années. En 2019, Loïc Cheynet a repris la barre de cette entreprise locale devenue un véritable fleuron. Chaque année, une trentaine de bateaux sort du chantier destination des océans et mers du globe. « Chacun d’enter eux réponde au besoins précis de chaue client. »
Courant 2021, l’entreprise a entrepris de se diversifier . « Nous avons trois commandes de voiliers de croisière tout en alu ,de 15m à 17m ». Afin de mieux maitriser le processus de fabrication, Loïc Cheynet a intégré, courant 2021, un bureau d’étude, un atelier de chaudronnerie et de soudure ainsi qu’un architecte d’aménagement intérieur. « Nous sommes passés de 6 à 18 salariés en 3 ans et avons clôturé notre exercice en juillet 2022 avec un chiffre d’affaires de 1, 8 M€ dont 25 % à l’export. » Au vu du carnet de commandes bien plein, il sera de 3 millions d’euros en juillet 2023. « Nous déployons également un réseau de revendeurs en France et à l’international et finissons d’eménager dans nos nouveaux locaux. » Bord à Bord a agrandi son atelier pour passer de 850 m² à 1450 m² de surface.
Enfin , pour mieux réussir sa diversification, Bord à Bord s’est rapproché de Dream Racer Boats fondée par Thibaud Ramond à Quimperlé. L’entreprise est spécialisée dans le refit de bateaux de course. « Il transforme des voiliers en bateaux de croisière haut de gamme qu’il aménage entièrement. » Les deux partenaires ont créé une nouvelle société : DRB Armor afin de mutualiser leur compétences.
Compétitivité par le développement local : Gwilen (29)
Architecte et ingénieur structure, Yann Santerre a créé Gwilen, projet innovant, qui transforme les sédiments marins en un nouveau matériau de construction pour le design et l’architecture. Le procédé désormais stabilisé, les premières applications validées, la jeune entreprise entame sa première année d’exploitation.
Gwilen a été créée en janvier 2020 dans le Finistère. « Chaque année, en France, 40 à 50 millions de mètres cubes de boue sont récupérés dans les ports. Jusque-là, c’était mis en décharge ou surtout renvoyé au large. Mais cela étouffe les écosystèmes marins et il y a de plus en plus de contraintes réglementaires ». Cela coûte moins cher aux professionnels de donner ces boues à Gwilen que de les transporter et les stocker. L’entreprise s’approvisionne dans l’estuaire de la Vilaine ou à Quiberon.
Sans ciment ni résine, la vase est transformée en un matériau solide via un procédé sans cuisson haute température. Le procédé est désormais stabilisé et repose sur une mutation intrinsèque des sédiments ou diagénèse. « Nous avons cherché à ajuster la consommation énergétique de la production à la performance usuelle du produit, ou comment consommer le moins d’énergie possible pour atteindre l’objectif visé ». Le produit fini se rapproche de la terre cuite. Ses caractéristiques sont semblables, si ce n’est cet aspect mat et douçâtre qui distingue le matériau Gwilen. Dans certains bains, des pigments naturels ont été ajoutés pour teinter la matière dans la masse. « Dans un premier temps, nous travaillons avec des architectes et des designers qui réalisent du mobilier et des objets de décoration« .
L’heure est à l’industrialisation du process, pour fournir le bâtiment en briquettes de façades, blocs de cloisonnement, et autres. Une levée de fonds sera lancée à la courant 2023 et un chimiste vient d’être embauché pour la recherche et développement.
l’évènement est soutenu dans le cadre du programme Breizh Fab 2018-2022 financé à 70% par la Région et l’Etat.