Après une vingtaine d’années passées dans la cosmétique à des postes de responsable marketing, Laurence Leprince Branly doit faire face à un plan social. Nous sommes au début de l’année 2021. « Une fois le choc passé, je me suis interrogée : comment rebondir à la cinquantaine ? » La Rennaise, profite des plans de formation proposés dans le cadre de son licenciement pour se mettre à niveau en digital. « Changer de vie professionnelle à 50 ans permet souvent de se diriger vers un métier de passion. J’ai toujours aimé les belles choses, féminines et élégantes et j’avais énormément de frustration autour du vélo. Il est devenu depuis quelques années mon unique moyen de déplacement en ville. J’ai donc croisé mes envies avec mes compétences et décidé de me lancer dans l’aventure entrepreneuriale. Un tel projet part souvent d’un besoin qu’on éprouve soi-même. »
Le vélo : encore une histoire d’hommes
Après une étude de marché approfondie et de multiples échanges avec des vélotaffeuses, Laurence Leprince Branly découvre combien, encore aujourd’hui, la pratique du vélo urbain chez les femmes se heurte à des problématiques sociétales plus larges : le difficile accès à l’espace public, l’insécurité des villes et l’inégalité domestique au quotidien. « Le vélo en France est culturellement associé au cyclisme sportif. Les femmes tentent difficilement de se faire une place. A ces freins à la pratique, il faut ajouter le manque de représentation féminine dans l’univers du vélo, la peur des réflexions, du harcèlement de rue, des pannes et des charges des courses ou des enfants. Pour toutes ces raisons les femmes ont plus de mal à reprendre le vélo. Cependant, une fois qu’elles ont dépassé leurs peurs, elles ne le lâchent plus et s’équipent beaucoup plus que les hommes, notamment sur le plan de la sécurité. »
Développement du produit en Bretagne
Fin 2021, la dirigeante se rapproche d’une styliste rennaise pour dessiner ses sacoches. Le cahier des charges est très technique. Le produit doit être résistant aux différentes charges, à la météo, adaptable à tous les vélos avec des systèmes d’attaches très fonctionnels et un volume suffisamment grand pour embarquer, par exemple, un ordinateur. Il devait aussi être élégant. « J’ai ensuite travaillé avec une modéliste installée à Plancoët (22) pour réaliser le 1er prototype. Tout le développement a été fait en Bretagne. L’ancrage local est essentiel. »
Un cahier des charges très technique
La mise au point du produit s’est révélée complexe. « Un vrai parcours du combattant ! Je voulais notamment que la sacoche s’accroche et s’enlève très facilement pour se transformer en cabas ou sac à main. Les bandes d’attache restent fixées au vélo. C’est un système unique. » L’étape suivante, à savoir la réalisation des premiers prototypes, a été la plus longue. « J’ai mis 6 mois à trouver un atelier de fabrication. A mon grand regret, il n’est pas en Bretagne, ni en France. La plupart des ateliers travaillent pour le luxe. Les petites séries ne les intéressent pas. » C’est au Portugal, dans la région de Porto que Belle en Selle a trouvé son partenaire. « Il existe là-bas tout un écosystème autour de la mode et de la maroquinerie qui facilite le sourcing. J’ai sur place une agente française qui suit la production. »
Accompagnée par la CCI Ille-et-Vilaine
En parallèle de toutes ces démarches, Laurence Leprince Branly a choisi la CCI Ille-et-Vilaine pour bénéficier d’un accompagnement sur mesure, via le dispositif Pass Création. « J’ai des rendez-vous réguliers avec une conseillère. On fait le point sur mon business plan. Surtout elle m’ouvre des portes, m’aiguille vers des professionnels, avocats, experts comptables, banquiers, etc. Ces contacts sont très précieux. » Par l’intermédiaire de la CCI, la créatrice d’entreprise a aussi pu faire une demande de financement auprès du réseau Initiative. « J’ai obtenu un prêt d’honneur de 10 000 euros, des facilités bancaires, etc. Au final, la CCI a été un formidable garant pour la réussite de mon projet. »
En vente sur Internet
Aujourd’hui, Belle en Selle propose deux modèles de sacoches déclinés chacun dans six colories. Le premier prix démarre à 149 euros. Il est possible de passer commande via le site Internet. « Je vais en parallèle commencer à démarcher des détaillants de vélos dans les centre-villes de Rennes ainsi que quelques boutiques. »
Membre du bureau de l’association nationale « Les Femmes A Vélo », elle se donne aussi pour objectif de revendiquer la place pleine et entière de toutes les femmes dans l’économie du vélo et à vélo ! « Tous les métiers autour du vélo sont encore dominés par les hommes. Ça doit changer ! conclut-elle. Créée en 2023, l’association compte 380 adhérentes, dont plus de la moitié travaille de près ou de loin dans le milieu du vélo (production, distribution, réparation, formation / réinsertion, associations, politiques etc).
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