, le 08.03.2018
Déchets et énergie : consommez moins et gagnez plus
Si la Bretagne est championne de tri en matière de déchets ménagers, celui-ci reste difficile à mettre en œuvre dans les entreprises où la collecte termine encore trop souvent dans un bac général. Pourtant, dans le prolongement de la loi sur la transition énergétique, un décret de 2016 oblige les entreprises à un tri à la source et à la valorisation de cinq flux de déchets : papiers/cartons, métal, plastique, verre et bois. Dans le même temps, le coût de l'énergie continue d'augmenter, représentant un budget de plus en plus important pour les entreprises. Pour gagner en compétitivité, il est donc temps d'activer les leviers du développement durable.

Trop peu d'entreprises encore trient leurs déchets ou les valorisent à la source, souligne Stéphane Lecointe, chargé de mission Entreprises BtoB au sein de l'Ademe (Agence de l'environnement et de la maîtrise d'énergie) en Bretagne. Même si on constate une évolution rapide en matière de tri ces cinq dernières années, force est de constater que très peu de chefs d’entreprise bretons connaissent le coût de leurs déchets. Pourtant, pour ceux qui s'y intéressent, trier les amène à prendre conscience des quantités jetées par type de flux et à remonter à leur source. En comprenant ainsi l'origine de leurs déchets, ils imaginent mieux comment les réduire. »
Une démarche similaire est proposée sur la consommation d'énergie des entreprises. Sur ces deux problématiques des déchets et de l'énergie (mais aussi sur les pratiques collaboratives, l'éco-conception et l'éco-innovation), l'Ademe et les Chambres de commerce et d'industrie bretonnes ont signé une convention. Gratuitement, des conseillers environnement se déplacent dans les entreprises afin de réaliser des pré-diagnostics donnant lieu à un plan d'actions sur-mesure.
"Le pré-diagnostic et les préconisations qui en découlent ont pour objectif d'améliorer les performances de l'entreprise et leur compétitivité en baissant les coûts liés aux déchets et aux dépenses d'énergie, notamment", résume Bruno Faou, conseiller d'entreprises à la CCI métropolitaine Bretagne ouest et animateur régional énergie. Regroupés sous l'appellation Objectif Performance Environnementale, ces pré-diagnostics concernent les entreprises bretonnes de plus de cinq salariés.
Pour généraliser cette démarche auprès des TPE/PME, l'Ademe et ses partenaires, parmi lesquels le réseau des Chambres de commerce et d'industrie lancent une opération supplémentaire d'accompagnement à la réalisation d'économies.
Haro sur les gaspis avec "Gagnantes sur tous les coûts"
"Avec 'TPE et PME gagnantes sur tous les coûts', on cible les entreprise de moins de 250 salariés, poursuit Stéphane Lecointe (ci-contre), c'est-à-dire là où le coût de la benne reste élevé. Après un pré-diagnostic énergie et déchets/matières gratuit, nos experts proposent un plan d'actions et un chiffrage en euros des économies pouvant être générées. Une fois validé par le dirigeant, ils le mettent en place avec l'entreprise et assurent son suivi sur un an."
Chatal, à Saint-Nicolas de Redon (Loire-Atlantique) fait partie des entreprises qui ont expérimenté ce dispositif entre juin 2015 et juin 2016. Spécialisée en mécanique de précision et traitement de surface aéronautique, elle souhaitait compacter ses plastiques de manière à réduire son budget déchet et améliorer sa performance environnementale. "Au bout d'un an, les bénéfices étaient là."
Et celle-ci pourrait bien s'envoler sous le coup de la décision des autorités chinoises en janvier 2018 d’interdire l’entrée sur leur territoire de 24 catégories de matière recyclées, principalement des plastiques et du papier-carton.
Trajectoire : zéro enfouissement
"Cette décision constitue un réelle opportunité pour la Bretagne. Il est grand temps de nous prendre en main et de nous occuper de nos propres déchets. Nous ne savons pas valoriser nos déchets, alors qu'ils peuvent à terme devenir des ressources, souligne Thierry Burlot, vice-président du conseil régional de Bretagne chargé de l'environnement (ci-contre).
Désormais responsable de cette compétence, la Région s'apprête à dérouler sa feuille de route à travers son nouveau "Plan régional des ressources". Il s'inspire de la consultation sur l'économie circulaire, lancée en novembre 2017 par le gouvernement. Les objectifs sont ambitieux : réduire de moitié la mise en décharge et recycler 100 % du plastique dès 2025.
Parmi les pistes évoquées, le retour de la consigne sur certains emballages. Ce que confirme l'élu breton : "Nous changeons de modèle, la trajectoire, c'est zéro enfouissement. Pour ce faire, nous allons construire des centres de fabrication de combustible solide de récupération, sur l'ensemble du territoire. Ca peut aller très vite, car la technologie existe."
Reste quand même à savoir de combien sera augmentée la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pour financer ces outils de valorisation et dissuader les entreprises et collectivités de recourir à l'enfouissement.
Démarrage de projets dans chaque filière
Pour chaque type de produit, comme le bois, le métal, le plastique, le verre ou encore les matériaux du bâtiment (gravats de béton), la Région va créer ou renforcer les filières existantes. "Nous devons assurer des gisement pour pérenniser chaque filière de recyclage et cesser de prélever de nouvelles ressources. Il existe par exemple une véritable gabegie autour des gravats du BTP, qui peuvent pourtant être valorisés pour extraire la roche ou les métaux puis être renvoyés dans le circuit pour une nouvelle utilisation. C'est pourquoi nous réfléchissons à intégrer dans les prochains marchés
publics une part minimum de ces matériaux recyclés."
L'élu breton assure que la Région ira par étape mais que, désormais, elle ne peut plus reculer. D'autres projets sont en cours avec Total, qui développe en Bretagne une filière autour de la récupération et le recyclage du polystyrène alimentaire. Ou encore Distro, une association de producteurs bretons de bières, cidres, vins et jus de fruits qui récupèrent les bouteilles en verre afin de les réutiliser. Ces projets sont complémentaires des outils de tri implantés en Bretagne. Parmi les plus importants, citons ceux pilotés par Guyot Environnement, les Recycleurs bretons, Paprec ou encore les nationaux Véolia et Suez.
Energie : avoir une consommation adaptée aux besoins de l'entreprise
Concernant la consommation d'énergie, la Bretagne est comparable à une "île", note Louis Maurice, élu CCI Bretagne référent sur la transition énergétique. Avec 80 % de l'énergie consommée importée sur le territoire, les entreprises locales sont dépendantes de l'extérieur... et le coût de l'énergie augmente ! L'élu de la CCI Bretagne incite donc les entreprises à s'emparer du problème. Des équipements moins énergivores à la production et au stockage de l'énergie localement, des solutions existent pour ne pas voir son budget énergie exploser, voire même le faire diminuer.
Bruno Faou, animateur régional énergie, s'attend donc à ce que les entreprises bretonnes se soucient davantage de leur consommation d'énergie. Et donne quelques pistes : "Il faut qu'elles s'intéressent aux certificats d'économie d'énergie, qui peuvent être revendus aux fournisseurs d'énergie." Autre conseil : vérifier que le contrat d'approvisionnement en énergie est bien adapté par rapport aux besoins réels de l'entreprise. "Selon le code NAF et la valeur ajoutée de la production, certaines entreprises sont éligibles à des exonérations auprès des douanes", assure le conseiller environnement.
Pour des préconisations sur-mesure et un plan d'actions détaillé, la solution reste les pré-diagnostics d'Objectif Performance Environnementale ou l'opération TPE & PME, gagnantes sur tous les coûts.
Les liens utiles pour adopter une démarche de développement durable dans votre entreprise

Louis Maurice
Elu CCI Bretagne référent transition énergétique
Parole d'élu
"Les entreprises bretonnes doivent se saisir des opportunités"
La Bretagne est une île. Aujourd’hui, elle doit importer plus de 80 % de l’énergie qu’elle consomme : c’est énorme. Les coûts d’infrastructures sont réellement importants et cette dépendance énergétique a un impact économique. En Bretagne, les Chambres de commerce et d’industrie ont un rôle à jouer dans la gestion des problématiques de développement durable dans les entreprises.
Ainsi, dans le cadre d’une convention signée entre l’Agence pour le développement et la maîtrise de l’énergie (Ademe) et la CCI de région, les entreprises bretonnes peuvent faire réaliser un premier diagnostic sur l’énergie ou les déchets. Qu’est-ce qu’elles consomment ? Comment faire des économies ? Comment produire moins de déchets ou valoriser ceux qui sont inévitables ?
Les entreprises bretonnes doivent se saisir de ces opportunités pour le plus possible produire et consommer de l’énergie locale. Il existe aussi des outils comme SMILE (SMart Ideas to Link Energies). La CCI Bretagne fait partie du conseil d’administration de cette association qui soutient le développement des réseaux intelligents et des énergies renouvelables en Bretagne et en Pays-de-la-Loire.
Enfin, les industriels comme les particuliers doivent prendre conscience de la nécessité de devenir autosuffisants en énergie : savoir mieux la consommer et la rapprocher des lieux de consommation.
Des gestes simples pour des économies qui comptent
Sur la question des économies d'énergie en entreprise, Bruno Faou, animateur régional environnement de la CCI, rappelle les principes de base : "Ce qu'on fait à la maison (éteindre la lumière quand on quitte une pièce, les appareils électriques...), on le fait en entreprise aussi ! Il est prouvé que rien qu'en adoptant des gestes simples et en modifiant des procédures, on peut réaliser 10 % d'économies."
Repères
Objectif Performance Environnementale
TPE & PME, gagnantes sur tous les coûts
Deux webinaires sont organisés les 6 et 24 avril. Inscriptions en ligne.